Une colère contagieuse
« Notre système de santé est prêt et notre vigilance est au plus haut niveau. » Contre le coronavirus, le ministre de la Santé Olivier Véran a visiblement choisi l’arme de l’antiphrase et de l’humour involontaire, bien que le sujet ne prête pas à rire. Que le système de santé ne soit précisément pas prêt à gérer une épidémie comme celle-ci, faute de moyens et de personnels, c’est précisément ce que dénoncent depuis bientôt un an les hospitaliers qui ont encore battu le pavé le 14 février dernier.
Qui va payer la facture ?
Le gouvernement a activé les « plans blancs » dans tous les hôpitaux. Seraient-ce enfin les moyens tant attendus ? Même pas. Ces plans permettent surtout de réquisitionner les personnels en repos et de trier les patients, en déprogrammant les soins pour les maladies « moins urgentes ». Il faudra donc gérer l’afflux de patients à budget quasi-constant.
Les patrons dont les affaires vont être perturbées par le virus font d’ores et déjà savoir que ce sont les travailleurs qui payeront la facture. À Air France, la direction pousse les salariés à prendre des congés sans solde ou à anticiper leurs vacances et a annoncé le gel des embauches. Une compagnie suédoise, SAS, donne déjà dans le chômage technique.
Le gouvernement français vient de « décréter l’état d’urgence économique » avec des mesures en faveur des entreprises (étalement du paiement des impôts et cotisations sociales, facilitation des crédits de trésorerie, etc.). Mais qu’a-t-il prévu pour contraindre les patrons à payer intégralement les salariés confinés chez eux ? Pour geler les licenciements et les suppressions d’emplois ?
La Recherche… de moyens
Macron, qui s’affiche beaucoup ces derniers jours (le serrage de mains en moins), a réuni jeudi des chercheurs. Le même jour à Paris, 8 600 chercheurs et étudiants manifestaient contre la Loi de Programmation Pluriannuelle de la Recherche (LPPR) qui va aggraver leur manque de moyens.
À cette occasion, un scientifique qui travaille depuis 17 ans sur le coronavirus admettait que « la majorité des projets qu’on avait sur le virus était en stand-by, en partie à cause de problèmes de financement ». Dans les laboratoires comme à l’hôpital, la même austérité produit les mêmes effets : faute de moyens, l’épidémie pourrait vite se transformer en crise sanitaire.
« On se lève et on se bat »
La contestation couve toujours. La semaine dernière, des lycéens étaient encore mobilisés contre la tenue des nouvelles épreuves du bac, les E3C, obtenant parfois leur report. Et les cortèges de samedi soir et du dimanche 8 mars pour la journée internationale de lutte pour les droits des femmes étaient plus fournis et plus jeunes que d’habitude.
La tribune de Virginie Despentes contre la remise d’un César à Roman Polanski est devenue slogan. Son « on se lève et on se barre » est devenu « on se lève et on se bat » dans la bouche de dizaines de milliers de manifestantes ce week-end.
Mais à chaque fois, le gouvernement répond par la matraque, que ce soit contre les lycéens ou contre celles et ceux qui manifestaient samedi soir à Paris.
Macron et ses ministres ne sont pour rien dans l’épidémie de coronavirus, mais ils espèrent bien qu’elle étouffe les braises de la colère sociale. C’est ainsi que le Premier ministre a fait passer en douce son 49.3. Mais gare à l’effet boomerang. Les raisons de cette colère n’ont pas disparu et les occasions de se faire plus qu’entendre non plus ! Une colère qui pourrait être au moins aussi contagieuse qu’un virus.
Une maladie chasse l’autre
À quelque chose, malheur est bon. Pour endiguer le coronavirus, la direction préconise le report des « réunions rassemblant un grand nombre de personnes ». Résultat : plusieurs conventions ont été annulées ou transmises uniquement en streaming. Les grandes messes, ça fait du bien de s’en passer.
Une direction qui s’en lave les mains
Face au coronavirus, la direction recommande de se laver plus fréquemment les mains. Pour cela il faudrait que les équipes de ménage puissent réapprovisionner plus souvent en savon et en serviettes les toilettes, et les nettoyer… alors que PEI fonctionne déjà en sous-effectif. Une situation créée par Renault qui à coup d’appel d’offres réduit les coûts de prestation. Pour lutter contre le coronavirus, il faudrait aussi s’attaquer au virus du profit.
Ni Dieu, ni mètre
Dans les mesures « barrières » visant à limiter la propagation du coronavirus, la direction conseille de « respecter une distance d’un mètre lors de vos échanges ». Il va falloir trouver des grandes salles de réunion ! Sans compter que les effets de cette mesure risquent d’être rapidement annulés vu l’entassement des salariés dans certains bureaux, cantines ou bus desservant le Technocentre.
Gare au capitalo-virus
Les salariés de Renault Douai ont été priés une nouvelle fois de rester chez eux vendredi 6 et lundi 9 mars. En cause, des containers bloqués qui entrainent une rupture de certaines pièces. Mais ce qui inquiète le plus les salariés de Douai, ce ne sont pas les conséquences du coronavirus. L’usine subissait déjà une baisse de production. Et ce ne sont pas les déclarations de Delbos, qui n’a « aucun tabou » sur les fermetures de sites qui les ont rassurés. Il ne manquerait plus qu’ils soient coronavirés !
La vie avant les profits
Le gouvernement italien vient de placer plusieurs régions en quarantaine, dont la Lombardie. C’est justement là, à Cordogno, que se situe MTA, l’unique fournisseur en pièces électroniques et électromécaniques de nombreux constructeurs comme Renault. Les pressions sont fortes pour que le travail reprenne à MTA. Au risque de mettre en danger les salariés ?
Lean et le yang
Renault Flins va chômer lundi 16 et mardi 17 mars à cause d’un manque de pièces pour la Micra. Avec le Lean issu de Toyota (travail à flux tendu, réduction des stocks…), un grain de sable peut bloquer toute la machine. A trop tendre le flux…
A coup de Korn
L’enquête Salariés Korn Ferry (ex-enquête Hay) est de retour. Avec son questionnaire sur le rapport des salariés à leur travail et à leur direction, l’enquête est supposée mesurer le climat interne de l’entreprise, et identifier les facteurs qui entravent les « performances ». L’occasion pour certains salariés de se lâcher. Sans illusion : cette enquête ne vise pas à satisfaire leurs réclamations, mais à remonter leur ressenti afin que la direction cible mieux sa com’.
Primes hors cadres
Les Cadres ont bien été évoqués lors des NAO qui se sont tenues à Renault. Mais l’absence de transparence continue sur la répartition et le montant de leurs primes individuelles. Et plus on monte dans la hiérarchie des chefs de service et des directeurs, plus c’est le blackout. Il y en a qui continueront de s’en mettre plein les poches avec des primes à 5 ou 6 chiffres… tandis qu’à d’autres, la direction fera le coup de la crise et des économies.
Le petit quota des choses
Dix pour cent. Non, ce n’est pas le montant des AGS (Augmentation Générale de Salaire), mais le pourcentage de Cadres qui n’auront pas d’augmentation. Un quota fixé à l’avance par la direction de Renault, et qui en dit long sur l’objectivité des mesures salariales.
Sans prime ni raison
La moitié des ETAM ne toucheront aucune prime de performance individuelle. Parce qu’ils ne sont pas performants ? Non, parce que la direction en a décidé ainsi. Quant aux autres, ils toucheront 400 ou 700 € brut, et pour les plus chanceux 1000 €. On est loin des primes versées aux directeurs.
Passage de coeffichiant
En 2020, passer au coefficient supérieur rapportera à un ETAM seulement 2 % d’augmentation de salaire. Quand on sait que certains techniciens restent au moins 10 ans avant d’avoir un coefficient, ça ne fait pas cher payé l’attente.
Notre patience est tabou
Clotilde Delbos l’avait annoncé : Renault « n’a aucun tabou » pour maintenir sa compétitivité, surtout pas de faire des économies sur le dos des salariés. Première victime : la filiale RRG (Renault Retail Group) va devoir céder 10 de ses 50 établissements d’ici 2024. Ce qui concerne la bagatelle de 1600 salariés, soit 20 % des effectifs en France. La direction affirme avoir « identifié des repreneurs fiables et robustes permettant une poursuite de l’activité et un maintien des emplois ». Une promesse qui n’engage que ceux qui y croient. Et on s’étonne que les salariés soient tabou ?!