Comme aux Fonderies de Bretagne, à Maubeuge, à Choisy-le Roi… Tous dans la rue, tous ensemble contre les licenciements
Le plan de suppressions d’emplois de Renault annoncé le 29 mai est une vraie saignée. 15 000 suppressions de postes dans le monde, dont 4 600 en France, dans tous les secteurs de l’entreprise : usines, centres d’ingénierie, direction tertiaires… À Choisy-le-Roi, c’est la fermeture totale du site, mais d’autres usines sont clairement sur la sellette comme Dieppe, Flins, Caudan ou Maubeuge, sans compter les sous-traitants.
Le gouvernement au chevet de Renault
« Renault joue sa survie », a estimé le ministre de l’économie Bruno Le Maire. Mais quand le gouvernement s’inquiète, c’est pour la survie des profits des patrons. Trois jours avant les annonces de Renault, Emmanuel Macron annonçait un plan de 8 milliards d’euros pour le « sauvetage de l’automobile », dont un prêt de 5 milliards pour Renault garanti par l’État.
Renault a totalisé plus de 25 milliards d’euros de bénéfices ces dix dernières années, mais ce sont les patrons que le gouvernement s’empresse de sauver. Il les finance en les laissant détruire les emplois.
Quelle crise ?
Renault n’est pas un cas isolé : nombreuses sont les entreprises où des plans de suppressions d’emplois et de licenciements sont annoncés ou en projet. Sans compter que les patrons utilisent déjà cette menace pour dire que les temps sont difficiles et qu’il faudrait faire des efforts : « travailler plus », accepter des salaires au rabais, tout y passe.
La crise du coronavirus a bon dos. En quoi le fait d’avoir mis au ralenti l’activité économique pendant quelques semaines aurait pour conséquence nécessaire de se retrouver au chômage pour certains et d’avoir à travailler plus pour d’autres ? La vraie raison de ces attaques est dans la rapacité des capitalistes qui veulent faire payer aux travailleurs les aberrations de leur système.
Pour notre survie, nos luttes
Les Fonderies de Bretagne, usine du groupe Renault, se sont mises en grève lundi dernier, face à la menace de fermeture qui avait fuité dans la presse. Cette réaction immédiate a poussé la direction locale à annoncer que l’usine ne fermerait pas. Les salariés des Fonderies ont eu bien raison de réagir aussitôt aux menaces en montrant leur détermination. A Maubeuge, une manifestation de plus de 5 000 personnes s’est tenue samedi pour réagir aux annonces de transfert de l’activité. À l’instar de ces premières mobilisations, il faut une riposte aux plans de Renault et du patronat.
Tous ensemble !
Certains, dans le monde politique, ne parlent que « relocalisation ». Pour Fabien Roussel, secrétaire du PCF, il s’agirait de « produire français ». On entend la même musique de tous bords, de Mélenchon à Le Pen. La question n’est pas là. L’emploi en France ne s’oppose pas à celui des usines Renault en Turquie ou dans d’autres pays. L’emploi à Flins ne s’oppose pas à celui des autres usines Renault en France. Pas plus que l’emploi de l’usine Renault de Maubeuge ne s’oppose à celui de l’usine de Douai.
La question, c’est la défense des intérêts de tous les travailleurs, par-delà les frontières, contre les profits égoïstes du grand patronat et des capitalistes.
Le monde du travail doit mettre en avant ses revendications. Il faut l’interdiction des licenciements, le partage du travail entre tous, et embaucher massivement dans les services essentiels à la société. Il y aurait moins à produire ? Alors, partageons le travail entre tous, avec le même salaire. Aux actionnaires de payer. La semaine dernière ont eu aussi lieu des rassemblements d’hospitaliers dans tout le pays, qui réclament des moyens pour l’hôpital et des hausses de salaire. Oui, il est l’heure de déconfiner les luttes sociales !
Faux amis, faux espoirs
Depuis que la direction de Renault a fait fuiter dans la presse ses projets de fermetures d’usines en France, c’est le grand jeu du « fermera-fermera pas » qui a commencé entre Renault, le gouvernement et des nuées de politiciens pressés de jouer les importants à la table des négociations. En attendant, ce sont les salariés mobilisés contre la fermeture qui risquent de se faire balader entre faux espoirs et vaines promesses, comme le montre déjà l’exemple des Fonderies de Bretagne où la direction a annoncé vendredi dernier au cours d’un CSE exceptionnel à Lorient qu’il n’y aura ni fermeture, ni cession, pendant que le même jour à Paris Jean-Dominique Senard, le président de Renault, annonçait lui que l’usine n’a « pas vocation à rester au sein du groupe ». On ne saurait être plus clair sur les intentions réelles de Renault et l’efficacité de ces négociations.
Fermeture à demi-mot
« Je n’ai aucune intention a priori de fermer l’usine de Maubeuge. Je vous assure, je ne l’ai jamais dit et je ne l’ai même pas pensé d’ailleurs » a déclaré ensuite le même Senard, pour essayer d’apaiser les 2100 salariés du site qui ont massivement débrayé vendredi dernier, et manifesté samedi, accompagnés par plusieurs milliers de personnes, en réaction aux menaces de transfert de l’assemblage de la Kangoo de MCA à Douai, ce qui reviendrait de fait à vider le site. La direction de Renault joue sur les mots et les rumeurs pour préparer les esprits aux restructurations. Les salariés n’ont rien à attendre des formules vides et des beaux discours.
Le Maire des naufrages
Le ministre de l’économie Bruno Le Maire s’est spécialisé dans l’accompagnement des naufrages industriels. Que ce soit à GM&S (La Souterraine, Creuse) en juillet 2017 où il avait affirmé que le « site restera ouvert » et que personne ne serait abandonné, ou à Ford Blanquefort, à l’hiver 2019, où il a assuré pendant des mois les salariés qu’un plan de reprise était possible, la recette est toujours la même. Le Maire multiplie les grandes déclarations et les réunions visant à rassurer les salariés tant qu’ils restent mobilisés pour défendre leur emploi, avant d’enterrer le dossier… et l’usine. Les salariés n’ont aucune confiance à lui accorder.
Faute avouée
L’explication la plus claire sur l’origine de ces restructurations est finalement venue de la direction de Renault elle-même : « Nous avions taillé nos coûts en fonction d’une croissance qui n’est jamais venue », a reconnu Clotilde Delbos, la DG de Renault. Une analyse qui a toujours été celle de tous les capitalistes au cours des périodes de développement, et qui est toujours suivie à chaque crise économique par des destructions massives de capitaux et des faillites en séries. Pas la peine de chercher l’ennemi à l’étranger, il se trouve aussi en France.
Unissez-vous !
Depuis le 4 mai les travailleurs des trois sites catalans de Nissan sont entrés en grève illimitée pour défendre leur emploi après les annonces de fermeture. Depuis, et malgré les difficultés liées à la gestion de la pandémie, ils ont réussi à paralyser la production non seulement sur place, mais aussi dans d’autres sites au Royaume-Uni et en France. Les capitalistes se servent de la division internationale du travail pour accumuler des millions. Les travailleurs confrontés aux mêmes patrons et à la même exploitation peuvent aussi en profiter lorsqu’ils entrent en lutte pour s’appuyer les uns les autres. La grève des travailleurs de Nissan à Barcelone peut être un point d’appui pour la lutte des ouvriers de Renault en France.
Nissan, ni Renault
Depuis l’annonce des fermetures de sites et des suppressions de postes à Renault, on entend dans la presse la petite musique habituelle selon laquelle ce serait la faute des patrons… de Nissan qui auraient pris le contrôle de l’Alliance. Ainsi pour Mediapart, le principal problème serait l’absence de « projet industriel » de la part de « l’Etat actionnaire ». En réalité, les patrons de Renault et les gouvernants de gauche et de droite qui se sont succédé au pouvoir depuis des années n’ont jamais eu besoin de personne pour mener leur politique anti-ouvrière au service des actionnaires. Les travailleurs de Renault et Nissan ne peuvent compter que sur eux-mêmes et leur solidarité à travers le monde.
Partage du travail
Toujours selon Mediapart, c’est aussi le renforcement de l’Alliance Renault-Nissan qui serait à l’origine de la vague de restructuration qui touche les salariés des deux groupes, Nissan se réservant le meilleur morceau avec le marché asiatique et les véhicules haut de gamme, alors que Renault n’aurait que la portion congrue du marché européen et du bas de gamme, moins rentable. Mais pour les dirigeants de l’Alliance, la question est surtout de savoir où trouver la main-d’œuvre la moins chère à exploiter pour arracher le plus de bénéfices à verser aux actionnaires. Les salariés ont tout à perdre en entrant dans ce genre de logique, et tout à gagner en exigeant le partage du travail entre tous, dans le monde entier.