Il y a un peu plus d’un an, Rémi Fraisse mourrait assassiné par une grenade offensive tirée par un gendarme à Sivens dans le Tarn. Ce jeune militant écologiste participait à un rassemblement contre un projet de barrage hydraulique qui aurait saccagé une vallée.
Circulez, y a rien à voir…
Un an après, l’enquête sur les circonstances de sa mort semble bien enterrée. Les gendarmes qui la mènent ont pondu un rapport exonérant à tel point leurs collègues de toute responsabilité que plusieurs journaux comme Le Monde ou Libération en ont épinglé la partialité.
Quant aux juges d’instruction, ils n’ont demandé aucun acte d’investigation depuis mars dernier, et s’opposent à l’audition du préfet et de son adjoint, « pas utile à la manifestation de la vérité », selon eux.
Valls sert la soupe à Vinci
À Notre-Dame-des-Landes, bourgade située à une vingtaine de kilomètres de Nantes, c’était jusqu’à cet été le projet d’aéroport qui avait du plomb dans l’aile. Au printemps 2014, le gouvernement avait mis le dossier au placard, non sans noyer la dernière manifestation des opposants – 30 000 personnes, dont bon nombre de grand-mères et de poussettes – dans un déluge de lacrymos. Ceux-ci pouvaient à bon droit estimer leur combat gagné.
L’aéroport actuel peut accueillir dix fois plus de trafic. Rien ne justifie la construction d’un nouvel aéroport, l’expropriation des paysans, le massacre du bocage et de la faune. Rien sinon la volonté de quelques multinationales comme Vinci de se gaver de milliards d’euros d’argent public. Rien sinon l’empressement des politiciens locaux comme nationaux à les servir. En juillet dernier, Valls prenait position pour la remise en route du projet. Et le 30 octobre, la préfecture de Loire-Atlantique a publié les premiers appels d’offre.
COP21 : un sommet d’hypocrisie
Le moment semble bien choisi. Hollande s’apprête en effet à recevoir 80 chefs d’État et tout un tas de diplomates à Paris pour la COP21. Cette conférence est censée fixer les politiques à suivre partout dans le monde pour limiter à 2°C le réchauffement climatique.
« Plus tard, ce sera trop tard », « nous ne pourrons pas dire à nos enfants que nous ne savions pas » : ces messages s’affichent depuis ce lundi sur les murs des grandes villes et dans les journaux. Comme si c’était nous – les salariés, la population – qui étions responsables de la dégradation de l’environnement ! Comme si ce n’était pas les capitalistes qui bousillent la planète pour quelques milliards de plus !
La reprise des travaux à Notre-Dame-des-Landes est à l’exact opposé des objectifs affichés de la COP21. Cela prouve, s’il était besoin, que discourir sur la protection de l’environnement tout en se pavanant avec Poutine et Obama n’engage en réalité pas à grand-chose. C’est faire de l’écologie à la sauce Mc Donald’s : repeindre l’enseigne en vert pour mieux continuer à faire du fric avec les mêmes méthodes.
L’écologie instrumentalisée par les patrons
Quant aux décisions qui pourraient être prises par les États lors de la COP21, les normes qu’ils adopteraient, elles seront d’abord autant d’outils, de leviers pour favoriser les multinationales, leur permettre d’imposer leur volonté aux pays pauvres ou en voie de développement et contrôler leurs marchés. Quand Hollande va en Chine préparer la COP21 et faire la leçon, il emmène des patrons signer des contrats « dans le secteur de la croissance verte » et discute de l’ouverture du géant du nucléaire français Areva aux capitaux chinois.
« Bienvenue à ceux qui viennent défendre la planète », proclame une autre affiche. Triste blague ! Pour défendre cette dernière, tout comme les peuples qui l’habitent, il faudra au contraire mettre les multinationales hors d’état de nuire.
Éditorial des bulletins d’entreprise du 9 novembre 2015