l’étincelle du 3 novembre 2020

A Pâques… ou à la Trinité

2021 sera « l’année d’ajustement de la workforce » (main d’œuvre) avant la « résurrection de Renault » selon la direction. Il suffit d’y croire. Mais avant de ressusciter, il va falloir sacrifier quelques milliers de salariés, et prendre le chemin de croix des réorganisations et des mobilités forcées. Et si la workforce n’avait pas envie de jouer les martyrs…

Les sang-bleu et les petits gris

La direction a classé les métiers de l’Ingénierie/Tertiaire selon leur degré de criticité ou de rareté. Comme d’habitude, les principaux intéressés n’ont pas été consultés sur ce classement et seront les derniers au courant. Case grise, c’est la mauvaise pioche. Mais si vous êtes dans les cases bleues, vous ne pouvez pas partir et n’aurez pas de coup de pouce salarial non plus. Toujours motivé ?

Trop de matière grise

La transformation de Renault, c’est simple comme un tableau à 9 cases. Pour sortir des cases grises en bas et à gauche (compétences en déclin, salariés surnuméraires) et gagner les cases bleues en haut et à droite (compétences critiques, salariés rares), il suffit de suivre les bonnes flèches « career path » (parcours de carrière), « up-skilling » (formation) ou « re-skilling » (reconversion). Et tant pis pour les autres : ils devront suivre la flèche « departures » (départ). C’est un peu comme le jeu du Rubik’s Cube, sauf qu’à la fin le cube a diminué de 40%. Il y en a qui prennent vraiment les salariés pour des pions.

Les compétences ne s’usent que lorsqu’on ne s’en sert pas

En pleine « transformation des compétences », Gilles Le Borgne cherche à rassurer en annonçant la création d’une « R&D Fortress ». Cette forteresse serait destinée à conserver en interne en France toutes les compétences nécessaires à la conception d’un véhicule, et à résister à la fuite des compétences vers les sous-traitants ou les RTx. Avec la même efficacité que la ligne Maginot ?

Recherche colocataire

Lors de son dernier « All Staff Meeting » en visio-conférence, le nouveau directeur de l’Ingénierie a évoqué la création au Technocentre d’une « Silicon Valley à la française ». La réalité est moins reluisante. Renault recherche du cash et en est réduit à louer des bouts du Technocentre à d’autres sociétés et partager les frais courants. Ce qui est possible car le site se vide suite aux milliers de suppressions de postes parmi les salariés Renault et les prestataires. Repeindre ça en projet de Silicon Valley, c’est faire de nécessité vertu. Encore un coup de com’.

Valley de larmes

Alors que le top management de Renault rêve de transformer le Technocentre en « Silicon valley », celle de Californie est en train de devenir un contre-modèle : incendies à répétition, loyers délirants, embouteillages monstres, forte présence du Covid liée à la densité de population… 60 000 salariés y ont été licenciés depuis mars 2020. Les autres cherchent à quitter la région de San Francisco. Les stratèges de Renault ont encore une valley de retard.

Les pompiers pyromanes

La direction annonce un renforcement des dispositifs de prévention des risques psycho-sociaux et des enquêtes tous les trois mois pour mesurer le niveau de stress. Toutes ces mesures visent à accompagner l’épidémie de stress qui ne manquera pas d’ap-paraitre avec la mise en œuvre du plan d’économie et de restructuration de Renault. Et le service médical sera chargé d’assurer le service après-vente.

Un compte qui n’a rien de personnel

Les salariés sont invités à créditer leur Compte Personnel de Formation (CPF). Une attention touchante. Mais loin de penser à l’épanouissement personnel des salariés, Renault réfléchit surtout à utiliser leur CPF dans son plan de transformation des compétences. Le « P » de CPF, ça ne voulait pas dire « Personnel » ?

Mort aux Vache-qui-rit

Erdogan, le président de la Turquie, a appelé au boycott des produits français en réponse à l’« islamophobie » de Macron. Mais si ses partisans ont enlevé des rayons de supermarchés des boites de Vache-Qui-Rit, ils ne s’en sont pas pris à Renault, pourtant très présent en Turquie. Et pour cause : le fonds de pension de l’armée turque, un des piliers du régime, est un des principaux actionnaires des usines Renault-Oyak. Quant à Renault, sa direction n’a jamais eu à se plaindre d’Erdogan qui a réprimé sans ménagement les grèves à Renault Bursa en 2015. Pas de quoi donc en faire tout un fromage.

Un Bridgestone à la française

Renault veut fermer son usine d’Oran en Algérie, où sont assemblés des kits de Symbol, Clio ou Sandero. L’usine a été ouverte en 2014. Renault a alors reçu des millions d’euros d’aides de l’Etat algérien. Une usine étrangère qui ferme après avoir touché des subventions du pays d’accueil, c’est ce que fait aussi Bridgestone à Béthune. Mais pour Renault Oran, on n’entend aucun politicien français dénoncer ce scandale. De quoi ne pas être dupe de toute cette démagogie nationaliste. Les 1200 salariés, mis au chômage partiel en mars 2020, ont commencé à se mobiliser contre cette fermeture. Ils ont bien raison.

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