Voilà, le FN arrive en tête aux Européennes. 25 % de ceux qui ont voté, c’est-à-dire à peine 43 % des électeurs, ont porté leur voix sur le Front national (soit moins de 11 % des inscrits). « Un choc, un séisme », dit le premier ministre Valls. Pourtant, c’est bien lui qui a servi la soupe à l’extrême droite, à coup de démagogie patriotarde, sécuritaire et anti-Roms. Dans ce style, c’est donc Marine Le Pen qui remporte la mise en se réjouissant qu’avec elle, « ce seront les Français les premiers servis ».
Mais quels Français, sinon tous ces grands patrons bien de chez nous qui, au nom de ce « patriotisme économique » dont on nous rebat les oreilles depuis des semaines, devraient faire plus de profits que les autres, en exploitant encore plus tous les salariés, français ou pas, en France ou dans le monde ?
Une victoire du FN, dont la gauche gouvernementale est responsable
Et Valls persiste et signe : « renforcer la compétitivité des entreprises » pour « leur permettre d’embaucher », dit-il. Encore des milliards aux grandes entreprises, en réalité pour mieux leur permettre de licencier.
Il se vante d’avoir exempté d’impôts sur le revenu 3 millions de très bas salaires : loin d’un cadeau, il revient seulement sur une des mesures de Hollande. Il se vante de combattre la fraude fiscale en récupérant 800 millions sur les comptes des très riches, nichés en Suisse. En fait, pas grand-chose par rapport à la fraude fiscale en France, qu’on estime à 80 milliards d’euros par an.
Toute la semaine qui a précédé le scrutin, ce sont surtout les pauvres qui ont été la cible du gouvernement. On nous a resservi la campagne gouvernementale contre la « fraude sociale » ! Celle au RSA et autres allocations, paraît-il. Il s’agit en réalité de ces « trop perçus », récupérés par exemple sur le dos des mères célibataires dont on va vérifier qu’elles ne vivent pas avec un concubin…
Mais on a oublié de nous parler de plus de la moitié des précaires ayant droit au RSA, mais qui ne le perçoivent pas, vu la complication des démarches. De cette façon, l’État a économisé l’an dernier 5,3 milliards d’euros sur le dos des pauvres.
La seule ambition de Marine Le Pen : parvenir en haut du système
Dimanche soir, on a vu défiler à la télé les différents chefs de partis, se lamentant sur leur avenir paraît-il menacé. Rien sur leur politique gouvernementale anti-ouvrière, présente ou passée, celle qui précisément les a laminés. Et du côté de Marine Le Pen ? Rien non plus. Pas un mot sur les problèmes du monde du travail.
Le Pen s’est contentée de proclamer le FN « premier parti de France » et de réclamer la dissolution de l’Assemblée nationale, pour de nouvelles législatives, tout en visant la présidentielle ! Tout pour elle et le FN, rien pour ceux qui lui ont donné leur voix. Pas l’ombre de l’ombre d’un programme contre les « parasites » et les « assistés » que sont ces grands patrons français, qui touchent les milliards d’aides de l’État et licencient tous azimuts. Ceux-là mêmes que Marine Le Pen n’accuse jamais.
C’est sûr, ceux qui ont cru aux sirènes de la « préférence nationale », en votant pour le FN, ont finalement voté pour les patrons français, et donc contre eux-mêmes.
Une seule patrie : l’humanité
La grande masse des abstentionnistes n’a visiblement pas souhaité choisir entre la gauche, la droite et l’extrême droite, toutes anti-ouvrières.
Mais ce n’est pas le moment de se résigner. Les travailleurs ont d’autres armes que les élections. À nous, salariés, de montrer que la toute-puissance patronale, dont Marine Le Pen est le fer de lance, n’est pas une fatalité. À nous de donner envie, aux côtés de nos camarades du reste de l’Europe, de reprendre le chemin des luttes. Que ces luttes commencent en Grèce, en Espagne, en Italie… ou ici, dans telle entreprise ou dans telle autre, ce sont elles qui, en se coordonnant, feront reculer les licenciements et les bas salaires en Europe et en France.
Et si, pour imposer des conditions décentes de vie et de travail, il faut se débarrasser du capitalisme en Europe, eh bien soit !