Les charges et impôts sur le travail sont moins lourds en France qu’en Allemagne, affirme Bercy
Alors que Louis Gallois, chargé d’une mission sur la compétitivité, souligne le poids exorbitant des charges sociales, la direction générale du Trésor, à Bercy, contredit ce constat. Les cotisations et impôts pesant sur le travail sont plus faibles en France qu’en Allemagne, souligne-t-elle. Seuls les 10% de salaires les plus élevés subissent une taxation globale supérieure.
Les coûts salariaux sont-ils beaucoup plus élevés en France qu’en Allemagne, expliquant la majeure partie de notre déficit de croissance par rapport à nos voisins ? Le patronat le souligne à l’envi, la plupart des experts le disent… mais la direction générale du Trésor, à Bercy, entend nuancer ce constat, dans une étude qu’elle vient de publier. Une prise de position qui est loin d’être neutre, alors que Louis Gallois, chargé par le gouvernement d’une mission sur la compétitivité française, a déjà pris position sur le sujet, affirmant que l’industrie française souffre avant tout du poids des charges.
Les hauts fonctionnaire du ministère de l’Economie se sont livrés à un examen comparatif minutieux des systèmes français et allemands, qu’il s’agisse de leur financement ou de l’organisation des prestations.
On sait qu’en France, les recettes de la sécurité sociale sont issues de cotisations à la charge des employeurs (assises sur les salaire bruts), pour une part beaucoup plus importante que la moyenne européenne. La protection sociale française est financée à hauteur de 44% par ce type de cotisations patronales, contre seulement pour 34% en Allemagne. Ce différentiel serait à l’origine d’une moindre compétitivité des entreprises françaises, entend-on souvent.
Plus de cotisations à la charge des salariés en Allemagne…
Mais en Allemagne, les cotisations à la charge des salariés sont, à l’inverse, plus importantes qu’en France, représentant 22% des recettes du système social (considéré globalement, tous systèmes publics confondus), contre 17% dans l’hexagone. Or, le distinguo entre cotisations employeurs et prélèvements à la charge des salariés n’a qu’une portée limitée : dans les deux cas, il s’agit de prélèvements basés sur les salaires, et qui grèvent le coût global du travail. Les cotisations sociales stricto sensu (hors CSG) pèsent du même poids dans les deux pays, représentant 20,7% du PIB en France, contre 20,5% en Allemagne, relève l’étude du Trésor.
En outre, les allègements de charge sont plus importants en France, en faveur des bas salaires. Ainsi, « considérées conjointement, les cotisations sociales (employeurs et salariés) pèsent moins sur le coût du travail en France qu’en Allemagne pour le premier quintile de distribution des salaires (les 25% de salaires les plus faibles) » souligne l’étude. « Il n’y a pas de désavantage univoque en France ».
… et plus d’impôt sur le revenu
Les experts de Bercy relèvent en outre le poids de l’impôt sur le revenu, plus élevé en Allemagne. Si l’on additionne donc l’ensemble des prélèvements obligatoires sur le travail, cotisations et impôts, ce que l’OCDE nomme le « coin fiscalo-social », il apparaît que les prélèvements sont moins lourds en France qu’Outre Rhin. Comme le relève le Trésor, « quel que soit le niveau de salaire considéré (à l’exception du dernier décile de la distribution des salaires) » les impôts et charges français sont moins élevés. « Le coin fiscalo-social est inférieur en France de 15 points en moyenne pour 20% des salariés (les moins bien rémunérés), puis de 7 points en moyenne jusqu’au dernier décile » (soit jusqu’aux 10% les mieux rémunérés). Bref, les Allemands paient moins de cotisations, mais plus d’impôts, sur leur travail. Et au total, à l’exception des 10% les plus aisés, la taxation globale du travail est plus lourde pour eux.
Moins de dépenses de retraites Outre-Rhin
Quant à l’équilibre financier des régimes de protection sociale allemands, il est atteint par une politique d’économies drastiques. Plusieurs facteurs contribuent à ce que le système allemand dépense moins. Outre-Rhin, le gouvernement Schröder a notamment « oublié » de revaloriser les retraites plusieurs années de suite -elles ont donc baissé en euros constants-, de 2004 à 2006. Du coup, les dépenses liées à la retraite ne représentent que 12,1% du PIB en Allemagne, contre 13,6% en France. Résultat : 13,4% des retraités allemands sont pauvres, contre 8,4% en France. En outre, les dépenses de santé ont été réduites, Outre Rhin, notamment, grâce à de nombreux déremboursements de soins, et de transferts de charge vers les mutuelles.